Le 5 juin 2025, un séisme politique et technologique a ébranlé le paysage spatial américain. L’affrontement spectaculaire, relayé en direct sur les réseaux sociaux, entre Donald Trump, Président des États-Unis, et Elon Musk, PDG iconoclaste de SpaceX et Tesla, pourrait avoir des conséquences désastreuses sur les programmes spatiaux civils et militaires du pays. Cette querelle, digne d’une tragédie grecque moderne, expose les vulnérabilités d’une stratégie nationale qui repose de manière excessive sur une entreprise privée et un seul homme.

Tout avait pourtant commencé sous les meilleurs auspices. L’alliance objective entre Trump et Musk, scellée par l’appui retentissant de Musk à Trump lors de la campagne présidentielle de 2024, semblait inébranlable. Mais le vernis a craqué. Le 28 mai, Musk annonçait son départ de son rôle officiel au sein du controversé U.S. DOGE Service. Le 31 mai, la Maison Blanche retirait la nomination de Jared Isaacman, un proche de Musk et astronaute amateur milliardaire, à la tête de la NASA. La riposte de Musk fut immédiate et virulente.

C’est alors que le détonateur a explosé. Musk a dénoncé le « One Big Beautiful Bill Act », un projet de loi pharaonique actuellement débattu au Congrès, le qualifiant d’« abomination répugnante ». Trump, fidèle à son style, a répliqué sur sa plateforme Truth Social, menaçant de résilier les contrats liant l’État américain aux entreprises de Musk, telles que SpaceX et Tesla. La bataille s’est ensuite déplacée sur X (anciennement Twitter), propriété de Musk, où ce dernier a accusé Trump, sans apporter de preuves, d’être compromis par des documents gouvernementaux non publiés liés aux activités illégales de Jeffrey Epstein, le criminel sexuel notoire.

Dans un crescendo de tensions, Musk a même semblé soutenir une procédure d’impeachment contre Trump. Plus incendiaire encore, il a annoncé, dans un message depuis effacé, que SpaceX allait « immédiatement désactiver ses vaisseaux Dragon ». Ces vaisseaux, véritables chevaux de trait du programme spatial américain, assurent la liaison entre la Terre et la Station Spatiale Internationale (ISS). De plus, Dragon est un élément clé d’un contrat entre la NASA et SpaceX visant à désorbiter en toute sécurité l’ISS en 2031. L’annulation du programme Dragon plongerait la NASA dans une crise majeure, la forçant à dépendre des Soyouz russes ou du Starliner de Boeing, un vaisseau spatial aux multiples problèmes. La désorbitation de l’ISS serait remise en question.

Mais les enjeux dépassent largement les frontières de l’ISS. SpaceX, grâce à ses fusées réutilisables Falcon 9 et Falcon Heavy, domine le marché des lancements spatiaux pour le Département de la Défense (DOD). La constellation Starlink, composée de plus de 7 000 satellites de communication, joue un rôle vital dans le conflit russo-ukrainien. Starlink fournit une connectivité essentielle aux forces ukrainiennes, permettant la communication et la coordination sur le champ de bataille. De plus, SpaceX est sous contrat pour construire une constellation massive de satellites espions pour le DOD et est pressenti pour lancer des intercepteurs spatiaux dans le cadre du plan de défense antimissile « Golden Dome » de Trump.

La situation a suscité des réactions extrêmes. Steve Bannon, ancien conseiller influent de Trump, a appelé à la nationalisation de SpaceX. Bannon a même accusé Musk, naturalisé américain, d’être un « alien illégal » qui « devrait être immédiatement expulsé du pays ».

La NASA, tentant de rester neutre, a publié une déclaration laconique, affirmant qu’elle continuerait à mettre en œuvre la vision du Président pour l’avenir de l’espace. Le marché boursier, en revanche, n’a pas caché son inquiétude. L’action Tesla a chuté de 14%, entraînant une perte de 152 milliards de dollars pour l’entreprise.

Une conversation téléphonique de conciliation entre les deux hommes aurait été annulée, et Trump aurait annoncé son intention de revendre la Tesla qu’il avait achetée en mars en signe de soutien à Musk. Malgré quelques signes d’apaisement, l’incident révèle une vulnérabilité fondamentale du système spatial américain : la dépendance excessive à une entreprise privée contrôlée par un seul individu. Cette situation soulève des questions cruciales sur la gouvernance, la sécurité nationale et l’équilibre des pouvoirs dans le domaine spatial. L’innovation disruptive de SpaceX a certes apporté des avantages considérables, mais elle s’accompagne de risques considérables qu’il est impératif de prendre en compte.

Cet article a été fait a partir de ces articles:

https://www.scientificamerican.com/article/the-trump-musk-fight-could-have-huge-consequences-for-u-s-space-programs/, https://www.scientificamerican.com/article/resilience-a-private-japanese-spacecraft-crash-landed-on-the-moon/, https://www.scientificamerican.com/article/inside-the-secret-meeting-where-mathematicians-struggled-to-outsmart-ai/, https://www.scientificamerican.com/article/forest-preservation-tree-planting-could-actually-worsen-climate-change/, https://www.scientificamerican.com/article/trumps-cuts-threaten-nasa-plans-for-astronauts-on-mars/